Mardi 19 mai 2020

Le quotidien n’a pas encore changé mais devrait changer demain car nous partons.
Je n’en ai pas encore bien conscience. Tout ça semble déconnecté de la réalité.
Ce matin, j’ai un call à 9h30 censé durer 15 minutes. C’est sans compter sur la présence de ma boss et sur les innombrables sujets que nous avons à aborder, question de timing et d’organisation sur les prochaines semaines et les prochains mois, telle une course contre la montre.
En parlant de course, Kara prend encore plus son temps ce matin que les autres jours et nous en arrivons à ne même pas avoir pu démarrer l’école à la maison quand je dois commencer mon call et que Steven en a un également qui s’est déclenché.
“Tant pis pour Kara”.
Je plonge dans un couloir de 2 heures de call sur la technique en premier lieu, puis les problématiques de référencement naturel qui ont été traitées totalement par-dessus la jambe pendant la refonte. Y a pas à dire, je pense que Florence aurait été là, les choses auraient été bien différentes. Entre elle absente et le chef de projet de l’équipe de dev qui a fait un burn out et a disparu de la circulation… franchement. Tout ça me fait bien pitié. Une fois de nombreuses pépites engrangées (qui auraient dû nous être communiquées depuis bien longtemps mais personne n’avait le temps – bizarrement après 2 mois de chômage partiel, les gens se mettent à avoir beaucoup plus de temps à nous consacrer – peut-être pour justifier leur salaire et leur activité), nous prenons de nouveau le temps d’un débrief du débrief. La situation va être tendue pendant les semaines à venir. Nous avons très peu de temps pour renverser la situation et s’occuper de tout ce qui peut nous apporter des clients quand le marché reprendra car il reprendra. Les gens ne cessent pas de se marier pour toujours. Et quand ça reprendra ils chercheront un système qui fonctionne vite et bien. Et on en est… loin ?
La couleur a été annoncée, le mois de juin, nous devrions être sous l’eau. Ça devait de toute façon forcément arriver.
Je devrais pouvoir poser mes vacances en juillet mais ça n’est pas encore totalement sûr. Nous attendons confirmation.
Quand je sors de la chambre, moulue par 2 heures de réunion sur mon lit, dans une position somme toute inconfortable et qui n’a d’intérêt que de me permettre de caresser mes doudous pendant que je bosse, Kara a disparu. Emmenée par Papy pour la faire travailler. J’en suis ravie pour elle, la situation me faisait mal au coeur.
J’ai peu de temps pour me préparer à aller passer ma toute première mammographie. Celle des 40 balais.
J’enfile mes chaussures, mon masque… je m’assure d’avoir bien mon ordonnance avec moi et je me lance dans la rue, pour aller plus loin que je ne suis jamais allée depuis le 4 mai dernier, lorsque je me suis rendue à l’école. Ça fait 15 jours que je n’ai pas remis les pieds dehors, même pour un tour de pâté de maison, même depuis le déconfinement.
Je traverse la rue et je tourne au carrefour suivant. J’arrive à la radiologie. Une pancarte indique que les patients doivent se présenter à l’heure précise de leur rendez-vous. Ici, adieu les salles d’attente pleines et les retards. Je ne sais pas si ça sera le cas partout mais ce fonctionnement qui aurait dû être la base d’un fonctionnement normal, semble plutôt efficace et me paraît comme une évidence. J’entre dans le bâtiment et suis accueillie directement au guichet où les dames se tiennent derrière des vitres en plexiglas. Elles me demandent mon ordonnance et ma carte vitale et je m’installe dans la salle d’attente où seulement 2 autres personnes attendent, avec les distanciations largement respectées. 20 secondes plus tard je suis appelée par une dame qui m’emmène faire la mammographie. Bon, je confirme ce qui avait pu m’être dit, ça n’est pas agréable… Les dames aux gros seins disent que ce n’est pas agréables. Je ferai donc partie de celles aux petits qui diront que ça ne l’est pas non plus. Je dois tenir des appareils de radiologie à pleine main et franchement je ne suis pas rassurée. Je finis par retourner en salle d’attente. Quelques temps plus tard, je suis de nouveau appelée par un autre docteur qui va cette fois-ci me faire une échographie. Là, ce n’est pas douloureux, ouf. Et il me donne directement le verdict, il n’y a aucun problème spécifique. Rassurée. J’avoue qu’en cette période, je n’ai pris que quelques minutes pour m’inquiéter d’un résultat qui aurait pu bouleverser ma vie à jamais… alors que la présence d’un virus hypothétique focalise mon attention depuis des mois…
Quand je me rhabille, je vois le docteur entrain de faire son protocole de désinfection et ça me rassure un peu.
Dans quel monde vivons-nous désormais ?
Je retourne en salle d’attente. Toujours peu de monde. Mais des gens entrent pour simplement prendre un rendez-vous. Ils préfèrent se déplacer plutôt que de téléphoner. J’ai vraiment du mal à comprendre. La temporalité semble étirable à l’envie. Je suis appelée pour payer. Au vu du prix, la carte bancaire est nécessaire, sans paiement sans contact…
Au bout de 45 minutes en tout je repars avec mes résultats.
Cette parenthèse dans ma journée m’a semblé totalement surréaliste. Pourtant, c’est ce que nous nous apprêtons à vivre les prochains mois, les prochaines années ou peut-être à jamais si d’autres virus viennent à faire leur apparition.
Après avoir déjeuné, puis fait la vaisselle, je me remets trop tardivement à mon goût au boulot, dans le salon, pour pouvoir avancer sur l’école à la maison de Kara. Heureusement, Thémis a fini son plan de travail et peut s’occuper des Arts visuels pour Kara et ça se passe bien.
Je profite du fait de pouvoir à la fois travailler et à la fois échanger avec les filles sans que ça me perturbe et m’interrompe. Mais le soir, je continue à bosser plus longtemps pour terminer ce que je veux finir pour ma journée.
Comme nous avons avancé la valise pour le week-end, nous nous organisons pour qu’une fois le dîner fini, nous puissions jouer à GW2 avec les garçons. Soirée exceptionnelle car nous sommes tous là, les 6 joueurs. Ca n’était pas arrivé depuis… en fait des années, et ça n’était pas forcément ces joueurs là car à l’époque Yann jouait aussi avec nous.
Nous passons une très bonne soirée à jouer et je réussis à m’installer dans mon lit pour en profiter confortablement. Ça suffit pour déplacer le perso et lancer les attaques.